L’ISOLEMENT DU DIRIGEANT, UN PHÉNOMÈNE DE PLUS EN PLUS FRÉQUENT
L’ISOLEMENT DU DIRIGEANT UNE VRAIE SOURCE DE PERFORMANCE
Synthèse
Témoignage de Nadine BEURROIES dirigeante de Agence-Méridienne.
Témoignage de Patrick CARIAS et Jérémy REYNAUD codirigeants de Keepcore.
Témoignage de Jean Pierre AMAT dirigeant de Novovis.
LE CONSTAT DU COACH
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L’ISOLEMENT DU DIRIGEANT, UN PHÉNOMÈNE DE PLUS EN PLUS FRÉQUENT
« La solitude du chef d’entreprise », « seul au sommet », ces expressions et bien d’autres reflètent bien le sentiment d’isolement des entrepreneurs et dirigeants d’entreprise. Ce phénomène n’est pas nouveau, il est même parfois salutogène pour le dirigeant (cf chapitre II). Il n’y a rien de nouveau même épaulé d’une équipe et de salariés, le dirigeant ressent à un moment donné cette étrange solitude de devoir décider, de devoir prendre la ou les décisions qui engagent l’avenir des salariés et de l’entreprise.
Le paradoxe de notre système économique est que ces décisions en période faste ou normale sont d’une part moins nombreuses à prendre et d’autre part certainement moins risquées car l’entreprise a devant elle un portefeuille de commandes sécurisant. Or, depuis quelques temps avec la mondialisation, les marchés fluctuants, les dernières innovations technologiques, la globalisation de l’information et encore plus avec la crise, la machine à prendre des décisions s’est emballée. Les décisions sont plus fréquentes à prendre ou du moins plus risquées car comme l’avenir est beaucoup plus incertain la décision peut avoir une incidence énorme sur l’entreprise et ses salariés. Cette même machine s’est emballée pour les entreprises en croissance.
Pour le dirigeant et ses équipes, il y a une prise de conscience que la performance de l’entreprise passera par la somme d’une masse de petits détails, c’est ainsi que plus qu’avant il devient nécessaire d’être sur tous les fronts :
- Négocier et convaincre son et ses banquiers : combien d’anecdotes pouvons-nous raconter sur telle ou telle entreprise qui a subi les décisions plus ou moins arbitraires de ses banquiers ? Une entreprise qui n’est plus ou peu suivie par son banquier est au bord du dépôt de bilan.
- Négocier et convaincre ses clients qui sont devenus plus exigeants, plus centrés sur le prix, et où le moindre écart peut devenir sujet à discussion, à décalage de paiement, à renégociation.
- Négocier et convaincre ses fournisseurs pour obtenir de meilleurs encours, de meilleurs délais de livraison afin d’être plus réactif.
- Comment transformer mes relations clients/fournisseurs et autres tiers en de véritables relations de partenariat durable ?
- Analyser et écouter son marché car de nouveaux concurrents arrivent sur le marché et de nouveaux marchés s’ouvrent.
- Remettre en cause son système de production pour une meilleure créativité et innovation.
- Revoir son système de prospection et faire plus de commercial.
- Définir des tableaux de bord beaucoup plus précis, réguliers presque au jour le jour et notamment pour la gestion de la trésorerie, la gestion administrative.
- Répondre aux inquiétudes des salariés qui voient bien que le portefeuille de commande n’est plus aussi sécuritaire.
- Motiver ses équipes en restant soit même confiant avec un moral d’acier car une équipe motivée, avec la niaque, saura être plus réactive et saura elle-même être plus créative et innovante.
- Il va de soi que la délégation est une des issues mais très rapidement le dirigeant prend conscience que la délégation se donne et se prend. Que vais-je déléguer ? A qui ? Comment ? Comment vont-ils le faire ? Le feront-ils ? Sauront-ils ? Comment vais-je les accompagner dans cette délégation ? Ne vais-je pas perdre plus de temps à l’expliquer, autant le faire moi-même ?
- Sans parler des pressions des actionnaires et associés qui s’inquiètent ou des croyances que le dirigeant se crée (« comment vont-ils réagir ? », etc...)
- Les propres peurs du dirigeant qui s’est souvent porté caution pour développer son entreprise, qui travaille de plus en plus tard et concilie de moins en moins sa vie professionnelle et sa vie privé.
Tout cet ensemble et bien d’autres points viennent créer un brouhaha intérieur au moment où le dirigeant a le plus besoin de calme intérieur, de paix intérieure pour avoir le recul nécessaire, la bonne hauteur pour prendre les décisions sur certains de ces points, pour être préparé à certaines rencontres stratégiques (banquier, clients, fournisseurs...) et pour prendre les décisions stratégiques importantes pour l’avenir de ses salariés, de son entreprise et le sien.
Certes bienvenue dans le métier de dirigeant mais lors de nos rencontres avec nos clients et nos prospects, nous constatons que depuis plusieurs années il y a une accélération et que l’espace-temps se modifie considérablement. Les banquiers, les clients, les fournisseurs, le marché mobilisent plus de temps qu’avant et en même temps très rapidement les salariés perçoivent de l’abandon ce qui alimente encore plus les peurs et inhibe la créativité et la réactivité, ce qui exige encore plus de présence à l’intérieur de l’entreprise.
C’est certainement pour cet ensemble de raison que l’isolement est la problématique la plus souvent évoquée par les chefs d’entreprises. C’est le cercle vicieux car cela se traduit en surcharge de travail, en stress, en nuits courtes qui alimentent encore plus l’incertitude dans l’avenir et renforcent l’isolement.
Ce n’est pas un hasard si Olivier TORRES, chercheur montpelliérain et grand conférencier reconnu nationalement, a obtenu des fonds de financement par différentes régions et l’état pour créer l’observatoire national AMAROK de la santé des entrepreneurs. L’observatoire AMAROK s’attache à étudier les comportements des dirigeants de TPE PME à l’égard de leur santé physique ou psychique. www.observatoire-amarok.com
Avec Olivier TORRES, nous avons réalisé grâce au concours de l’Agglomération de Montpellier, que nous remercions vivement, une conférence le 9 novembre 2010 sur : La santé du dirigeant, source de performance. Lors des échanges avec les dirigeants, nous constatons que la majorité de ces dirigeants ont déjà entamé des solutions pour sortir de l’isolement en :
- Adhérant à différents clubs d’entreprises (réseaux, syndicats...)
- En travaillant en réseau et avec des partenaires
- Participant à des conférences, colloques, ateliers, petits déjeuners professionnels
- Rencontrant des experts
L’ISOLEMENT DU DIRIGEANT UNE VRAIE SOURCE DE PERFORMANCE
Synthèse
Ecrire cela « source de performance » peut paraître surprenant pour le dirigeant qui vit dans ce brouhaha intérieur et qui a des décisions stratégiques à prendre et à mettre ou faire mettre en œuvre. En même temps, cela peut paraître présomptueux comme si j’allais donner les clefs de la performance qu’il suffirait d’appliquer et tout est réglé. Bien sûr, je ne crois pas à ces clefs ou ce genre de solution magique qui n’existe que dans les théories.
Toutefois, l’isolement est aussi une source de créativité et de performance. En effet, l’idée créatrice, la décision importante, la décision stratégique, le plan d’actions et objectifs émergeront à l’intérieur de cet isolement, dans ce creuset de calme intérieur, de paix intérieure que l’on appelle aussi en science cognitive ou neuroscience ce vide créatif.
Le rôle de l’accompagnant coach est de créer un contexte dans lequel le dirigeant pourra prendre conscience de ses croyances limitantes, de ses potentialités, et de l’aider à changer de cadre de référence pour entrer dans un cadre qui libère la créativité, qui définit des décisions et des plans d’actions. Il pourra aussi accompagner les équipes dirigeantes pour qu’elles- mêmes soient créatrices dans les plans d’actions et se positionnent plus avec le dirigeant en catalyseur de performance pour l’entreprise.
Il n’y a donc pas de solution générale, chaque cas est un cas particulier car chacun vit son propre brouhaha intérieur et celui de l’un n’est pas le même que celui de l’autre.
Pour illustrer cette source de performance, je vais m’appuyer sur 3 clients témoins qui ont bien voulu témoigner lors de mes conférences et je les en remercie profondément :
Témoignage de Nadine BEURROIES dirigeante de Agence-Méridienne.
- Quels nouveaux marchés ? Quels nouveaux challenges ? Sont-ils les bons ?
- Qui me suivra dans cette aventure ?
- Vais-je être obligée de tout porter ?
- Comment être disponible pour ces nouveaux marchés sans rentrer dans une spirale où je serai surchargée ?
- Comment mes salariés vont s’engager dans ce nouveau challenge ? Seront-ils responsables ? L’exigence qui est notre force sera-t-elle au rendez-vous ?
- Sans parler de la culpabilité du dirigeant : comment concilier dans tout cela ma vie de dirigeante et mon rôle de mère et de femme ?
- Comment ne pas transmettre mes angoisses à mes salariés qui se bougent et me font confiance au quotidien ?
Avec Nadine BEURROIES, nous avons eu 3 entretiens individuels en Mai et Juin 2010 (2 en face à face de 2h et un au téléphone d’1h). Ces échanges ont permis de poser ces vraies questions intérieures et bien d’autres, d’avoir un effet miroir et se centrer sur ses potentialités. En plus de rompre son silence intérieur en y mettant des mots et des solutions, elle a rompu le silence intérieur de l’entreprise réalisant un séminaire d’entreprise en juillet 2010 d’une journée avec tous ses collaborateurs où l’enjeu était pour chacun de prendre conscience de son importance au sein de l’entreprise et de définir un projet commun d’entreprise.
Témoignage de Patrick CARIAS et Jérémy REYNAUD codirigeants de Keepcore.
Keepcore est par excellence la startup qui a démarré tout feu tout flamme grâce à la créativité, l’innovation et le dévouement de ses 2 codirigeants qui à l’image des codirigeants de Google travaillent en parfaite osmose et amitié. Un bel exemple que l’on aimerait voir plus souvent. Depuis 2 ans, l’entreprise vit une autre maturité, elle est sortie du stade de la startup et est entrée dans le contexte classique d’une PME et non d’une banale startup d’une durée de vie de 3 ans grand maximum. Depuis 2 ans, ils sont persuadés qu’ils doivent changer leur système de management pour arrêter de courir et être plus dans l’écoute du marché, des produits et continuer le développement de l’entreprise à travers leurs équipes. Comme toute entreprise en forte croissance, Keepcore a besoin de trésorerie, ayant un fort optimisme quand au projet de Keepcore, pour protéger financièrement l’entreprise, ils ouvrent le capital à un nouvel actionnaire.
En juillet 2010, quand ils me rencontrent, la problématique pour eux deux est très simple : les solutions nous les avons depuis 2 ans : nous devons déléguer, mieux former nos équipes, les accompagner. Pour cela nous devons lâcher certaines actions comme produire, développer, aller en clientèle mais nous ne le faisons pas et cela devient une urgence car l’avenir de Keepcore passera par des équipes plus compétentes et par des codirigeants centrés sur l’innovation, le commercial, l’exigence du travail bien fait par les autres.
Témoignage de Jean Pierre AMAT dirigeant de Novovis.
L’entreprise Novovis existe depuis plus de 22 ans, elle vend des armatures en acier et bande à joint et autres accessoires pour les plaques de plâtre. Quand je rencontre Mr AMAT en début 2009, son message est très clair :
Nos premiers échanges ont eux aussi permis de sortir de cet isolement car simplement poser la vraie problématique permet de trouver des plans d’actions. La première des choses a été de constituer un nouveau comité de direction en y faisant entrer d’autres personnes. L’équipe a ensuite réalisé un travail collectif pour se centrer sur de nouveaux indicateurs de mesure, de créer de nouveaux processus, de s’approprier des décisions sans forcément attendre l’aval du dirigeant (bien sûr un processus interne lui permet de connaître les décisions) et de les mettre en application.
Le système de management en interne a été beaucoup plus délégatif et centré sur l’action avec une question toujours en fond « que devons-nous faire de différent pour être plus efficace et performant ? ». Pendant ce temps, Mr AMAT s’est centré sur les enjeux externes. De fortes négociations avec ses banquiers, fournisseurs, de nouveaux fournisseurs. De plus, ils ont été innovants en brevetant 4 nouveaux produits et se créant de nouvelles parts de marché en France et à l’étranger. Conclusion, sur l’exercice 2009/2010 (l’entreprise clôture en septembre) Novovis réalise plus de 36% de CA par rapport à l’exercice 2008/2009 et son plus beau CA depuis 22 ans avec un taux de marge sensiblement le même.
LE CONSTAT DU COACH
- Poser tout ce brouhaha intérieur cité au-dessus afin de pouvoir y mettre des vrais mots pour prendre conscience à la fois de ses croyances limitantes et de ses potentialités.
- Changer de cadre de référence en créant un espace de vide intérieur afin que le dirigeant le remplisse par une véritable créativité d’idées, de valeurs qui sont transformées en objectifs, en plan d’actions, en décisions et en mises en application.
Je constate que cet isolement créatif devient une source de performance pour l’entreprise car par effet systémique le reste de l’entreprise va rompre son brouhaha intérieur en se responsabilisant, en devenant plus autonome sur les décisions, sur leurs mises en applications.
En interne, cela se verra par une entreprise qui développe un système faciliteur de processus et de créativité. Les indicateurs de mesure deviennent un véritable outil de motivation et de management et ne sont plus perçus comme du jugement mais plus comme un arbitrage en fonction des décisions. Ils tirent vers l’efficacité. L’adage « on ne devient que ce que l’on mesure » se vérifie. En interne aussi, se développe la communication, la cohésion, dans notre jargon, on parle d’intelligence collective, d’intelligence d’intuition, de rigueur, de gagne, d’innovation.
La PME dans son ensemble réussit à concilier l’émotion et la raison ce qui est un plus pour la performance et le bien être de l’entreprise. En effet, en PME l’émotionnel est très fort et parfois très limitant. La PME permet une proximité qui est motivante et parfois stressante pour le dirigeant car il est au courant des projets professionnels et personnels de ses salariés et va souvent projeter sur lui-même les projets de ses collaborateurs, un peu comme s’il se sentait responsable des projets de ses collaborateurs.
Tout cet ensemble crée une alchimie qui devient un savoir-être créateur de performance pour l’ensemble de l’entreprise.
Claude ARRIBAS
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